Big Bang, 2004.
Photomontage, Rag bright white inkjet pigment print on 310g mat paper, h20 x 30 cm.
Edition of 5 + 3 artist copies.
Photomontage published with a text (see below in French), in online review Hypercourt #2, editions è®e, Paris, 2004, and with another text The Republic of Images in online review Tales Magazine #5, Paris, 2010.
“Big bang” (in French), Revue Hypercourt, 2004.
Au quartier général de La Petite Industrie de l’Image Sensorielle, la cellule de crise n’en finit plus de débattre, d’analyser encore une fois les données, d’imaginer les hypothèses conceptuelles et les scénarios les plus improbables comme autant de moyen d’organiser ce chaos. L’échauffement syndical, verbal, cérébral écrase la fraicheur attendue du crépuscule et continue de faire tranquillement monter la température de la pièce. La fumée s’intensifie comme une sorte de brouillard diffractant et propice aux mirages. Les nappes de chaleurs tordent les signaux visuels et sonores; le délire s’installe tranquillement; les images entament leur processus d’émanation poétique.
Leurs vibrations parfois assourdissantes orchestrent une cacophonie muette. Quelques percées mélodiques font jaillir un peu de lumière ça et là comme autant de lueurs d’esprit immédiatement digérées par le débat incessant. La dynamique générale s’intensifie. Les images hurlent de leur langue barbare leur message crypté, revendiquent leurs droits, n’en finissent plus de négocier leur valeur, individuellement pour les plus fortes, collectivement pour les plus pauvres… rien de nouveau sous le soleil, même s’il est emprisonné sur du papier glacé.
Spéculation intense de tout bord, le cirque continue, les images-marionnettes font leur cinéma. L’une affirme qu’elle ne ment jamais et qu’elle est une pièce à conviction; l’autre dit qu’elle signifie le monde et se prend pour un symbole. Celle-ci essaie de communiquer son message pendant que ses voisines persistent à le diluer en occupant le terrain. Celle-là, en mauvais piège à conviction, fait sa jolie et croit faire rêver ou bien rêve de faire croire. Celle-ci se prend pour un logo, un schéma mathématique, ou une peinture abstraite. Celle-là se prend pour un titre de transport, l’autre pour un habit du monde tandis que sa jumelle prétend le déshabiller et rendre visible l’invisible. Des groupuscules se forment; “nous écrivons le monde” disent-elles, “nous dupliquons le monde” disent d’autres; “nous codifions”, “nous modifions”, “nous dialoguons”, “nous vivons”, “nous existons”,… mais d’autres désespèrent dans leur coin et se sentent comme de vieilles feuilles séchées. Elles se laissent porter par les courants d’air déployés par les autres, volent dans leur sens pour leur voler un peu d’essence. Derrière son écran urbain, le laboratoire artificiel un monde cloné, semi-autonome, et à la matérialité ambigüe dont il fait lui-même partie… ça devient vraiment compliquer.
Peut-être ne devrions-nous parler que de couleur et de texture, de densité, de relief et de réactions chimiques comme un géologue reconstruit le travail du temps en auscultant la matière.
Mais trop vite le pouvoir de l’imagination prend encore le dessus et les images-fossiles deviennent pierre philosophale ou matière chimique éthérée… Les veines d’exploration, se croisent, se complexifient et forment une dentelle neuronale infinie… Un joli cerveau rempli de mot et d’images, un circuit imprimé mais en perpétuelle mutation…
C’est le grand jeu de la recomposition infinie, de la partie d’échec qui recommence sans se répéter… on s’ennuierait tellement si on avait trouvé la solution !
Plutôt que d’épuiser par une surchauffe conceptuelle le rendement énergétique de sa matière première, la cellule de crise émet l’idée de se rafraichir les idées et faire baisser la température en allant à la piscine municipale cet après-midi…
